Généalogie et Histoire en Pays Dolois  

Dol de Bretagne, histoire et cartes postales

Quelques pages d histoire locale

 

 

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Ils ont débarqué.

Le 6 juin 1944 à l’aube débutait la plus gigantesque opération militaire de tous les temps, celle que l’on attendait sans trop y croire : l’opération Overlord . Les forces alliées débarquent sur les plages normandes. La bataille de Normandie commençait. Ce fut l’apocalypse et la désolation. Apocalypse tombée des forteresses volantes dont on croyait qu’elles apporteraient le salut avec un espoir infini et la joie au cœur.

Ils ont débarqué et avec eux l’enfer des combats.

A l’entrée de la Bretagne, à Saint-Georges de Gréhaigne ou Francis Pelé s’était réfugié, dans la ferme de sa mère, ce matin là on entend des coups sourds très lointains, tout vibrait : les lits, le sol des polders semblait bouger, on aurait cru un tremblement de terre et tout le monde est éveillé. Cette fois c’était sur, depuis le temps que l’on attendait ce ne pouvait être autre chose, tout le monde fut vite debout, et dehors dans la cour, ils s’interrogeaient, ce roulement de bruits sourds que l’on continuait à entendre en direction de la Normandie. Son beau-père qui avait fait la guerre de 14-18 dit : « Cette fois çà y est, c’est le débarquement ».

Quelques instants plus tard, avec le lever du jour paraissaient dans le ciel des avions, sillonnant les routes et les voies de chemin de fer.

Cette fois c’était bien certain : la délivrance approchait ; mais l’inquiétude se lisait sur chaque visage.

Aussi le travail de la ferme se borna t’il seulement aux soins du bétail, car tous les hommes valides se mirent à creuser des abris.

On écoute la radio : les alliés débarquent sur la côte normande.

Il était attendu depuis si longtemps ce débarquement, qu’allait-il se passer ? Il était temps, car la situation devenait impossible et périlleuse, il avait fallu reprendre la clandestinité depuis quelques mois, car vivre à Dol pour un jeune c’était dangereux.

Avec Louis Legros et Auguste Boutrouel des polders, ils avaient organisé un service d’écoute de radio qui leur permettait de connaître l’avance des alliés sur le front de Normandie.

Dans une vieille maison, il avait installé une dynamo sur une meule à main et il fallait que l’un d’entre eux tourne la manivelle pour produire l’électricité nécessaire au fonctionnement de cette radio.

Ils écoutent cette radio de Londres avec un poste de radio caché dans le grenier de la ferme «blount», dans les polders. Cette radio sur laquelle on pouvait entendre ce message : « Ici Londres, les Français parlent aux Français ».

Il se consacre au sabotage des lignes de communications téléphoniques et des câbles, mais il n’eut pas de chance dans le secteur de Pleine Fougères. Dans le secteur de « Bollande », il était déjà grimpé dans un poteau téléphonique en vue de couper les câbles quand il aperçut un soldat allemand qui dormait tout à coté. Une autre nuit, il entreprit de couper le câble souterrain Brest-Paris, enterré dans le bas côté de la route ; il était minuit environ et à un endroit dit « la côte du caillou », il avait déjà dégagé une portion du dit câble se trouvant à un mètre cinquante de profondeur, se préparant à le scier – cette ligne pouvait transporter une quarantaine de communications - , c’est alors qu' íl perçut le roulement continu d’une vague d’avions qui filaient dans la direction de Rennes ; et sitôt après, trois camions allemands on stoppé, moteurs arrêtés, juste devant lui. Les allemands sont descendus de leurs véhicules, ont scruté le ciel, se faisant, marchant sur ses outils, le frôlant de leurs pieds ! ... La vague d’avions passée, les allemands sont remontés dans leurs camions. Il a vécu là si fort en pensée son dernier quart d’heure, qu’il n’eut plus la force de couper ce câble (il l’a toujours regretté). Il apprit quelques jours plus tard qu’une équipe de Plerguer avait réussi, elle, a couper ce câble dans la région de Vildé-Bidon. Le plus médusé fut sûrement le cantonnier de service, Jean Bigrel, qui ne comprit pas pourquoi quelqu’un avait fait cette tranchée dans la « banquette ».

En Normandie, la quatrième division américaine met le cap sur Avranches qu’elle atteint le 30 juillet. L’avantage est poussé jusqu’au pont de Pontaubault. La porte de la Bretagne est ouverte.

Résistance à Plerguer.

Renard, l’un des chefs de la résistance de Plerguer lui demande d’envoyer un message afin de faire venir un hydravion sur l’étang de Beaufort pour récupérer un aviateur anglais caché à Baguer Morvan. Malheureusement il fut impossible de passer ce message, ce qui lui valu d’être traité de « dégonfleur » par Renard.

Sortant de chez Renard, alors qu’une locomotive se trouvait près du passage à niveau, un avion allié les survola, Renard lui fit de grands signes avec son mouchoir, l’avion vire et revient, mais ils n’ont que le temps de se coucher le long de la voie, les rafales pleuvent sur la locomotive. Lorsqu’ils se relèvent ils constatent que le chauffeur et le mécanicien sont grièvement blessés : Chenu et Rétif. Chenu devait mourir. Francis rentre alors par le sentier longeant la voie et prévient madame Rétif que son mari était blessé.

Il retourne alors à son refuge de Saint Georges, pas pour longtemps, car à Plerguer un groupe de résistants le demande, l’abbé Cohu et Francis Douard viennent le chercher. Il repart donc à Plerguer avec sa femme sur le cadre de son vélo. L’abbé Cohu, lui, roulait sur un vélo à pneus pleins, une selle qui n’avait plus que les ressorts et sans freins passe au travers d’un troupeau de vaches en descendant la cote de sains et, miracle, il ne plonge pas dans l’étang.

Par les petites routes ils arrivent à Plerguer où un travail important les attendait. Il s’agissait de construire des postes de radio fonctionnant sur piles, puisqu’il n’y avait plus d’électricité, et avec du matériel de récupération. Ils s’organisent et la classe de l’école devient vite un atelier de radio, quand tout à coup apparaît dans la cour un groupe d’allemands venant réquisitionner les lieux. L’abbé Cohu les apercevant se rend au devant d’eux et parlemente tout en passant dans les poches arrières de sa soutane deux grandes piles anglaises.

Pendant qu’il retient les Allemands dans la cour Francis Douard et Francis Pelé camouflent sous l’estrade, dans le bureau, dans le poêle, toutes les pièces de radio qui se trouvaient sur les tables puis ils firent semblant d’étudier comme de grands écoliers.

De cette opération Francis Pelé ne rentra pas « bredouille », le menuisier Francis Douard lui ayant donné un fusil MAS 36, l’un de ceux qui furent récupérés en plongeant dans l’étang du Rouvre où ils avaient été jetés par les Polonais, combattants dans l’armée française en 1940 et qui s’étaient retranchés à Dol, avant d’être faits prisonniers.

Ces armes, après un gros travail de restauration, furent remises en service

Avant de retourner à Saint Georges, il rend visite au boulanger Coquelin de Plerguer, celui là qui ravitaillait le maquis de Broualan, qui sans hésitation lui dit : sert toi.

Pour atteindre le grenier ou étaient cachées les munitions, il fallait monter sur les chariots des allemands qui se trouvaient juste au-dessous. Sans hésiter, Coquelin grimpant au nez des allemands lui remet un paquet de détonateurs et de cordon bickford qu’il glisse sous son chandail.

Il reprend alors la route de Saint Georges, sa femme sur le cadre de son vélo, en suivant le sentier de la voie de chemin de fer.

Le père Renard, distillateur, avait constitué un petit réseau autour de lui. Son mécanicien Jean Riquet fabriquait des explosifs : au pont de Lantrichet, sur la voie Dol-Dinan, il dynamita les rails... un grand morceau vola au loin, mais manque de chance, le train continua sa route sans dérailler ; Francis Douard, pour sa part, tournait les panneaux routiers en sens inverse. Les allemands, à la fin surexcités, ont alors décidé de prendre comme otages le maire, Pierre Romé (originaire de Dol), et le mécanicien Pichon ; ils les ont emmenés, baïonnette au canon, dans le coin d’un champ. Là, le maire Pierre Romé dit à son compagnon : « Ils vont nous fusiller, ces cons là ! » Le père Pichon, très calme et d’une voix de stentor, rétorqua : « On va bien voir ! »

Aujourd’hui encore, à Plerguer, lorsque l’on n’est pas sûr d’une chose, l’on dit : L’on va bien voir ! »

Saint Georges.

De retour dans son refuge, il retrouve toute une équipe avide d’informations

Un avion anglais étant tombé en flammes tout à côté, le pilote réussit à sauter en parachute, tomba dans l’herbe et se cacha dans une criche ; malheureusement un détachement de jeunes allemands se trouvait tout proche ; le parachutiste blessé fut rapidement pris et, passant près d’eux, ces jeunes soldats leur dire , tout fiers : « Voilà notre premier prisonnier ! »

Une grande quantité de munitions se trouvaient parsemées qu’il récupérait ce qui lui permit de constituer un bon stock de poudre. Avec Louis Legros, Auguste Boutrouel et le vétérinaire Riou ils organisent des moyens de protection.

Mais déjà ils entendent les détonations dans la région d’Avranches, puis plus proche, de l’autre coté du Couesnon, un combat de chars avant Pontorson. Puis ce sera très rapidement la libération de Pontorson.

Pierre Orvain pris par les Allemands en franc-tireur, le long du Couesnon, fut fusillé sur place devant un peuplier. Il fut ainsi l’un des premiers morts français en Bretagne.

Des milliers de soldats allemands, fuyant la Normandie, traversent les grèves et beaucoup passent à Saint-Georges. Appelé à dépanner un poste de radio à la ferme Faguais dans les polders, brusquement apparaît dans la cour un groupe de soldats allemands en débandade et débraillés avec des chapelets de munitions autour du cou. Ils venaient de passer le pont de Beauvoir près du Mont Saint Michel et demandaient la direction de Saint Malo. Ils demandaient aussi à boire et pour les calmer il leur fut servi à boire et à manger. L’un des soldats s’empara du vélo de Francis, mais trop heureux de ne pas avoir été fouillé et trouvé en possession de pièces de radio, il réussi à s’éclipser et rentra à travers champs chez sa mère.

Pendant ce temps, ils pouvaient entendre les détonations très proches sur la Normandie, de l’autre côté du Couesnon.

Pontorson.

Arrivant de Pontaubault, l’armée Patton se heurte avant Pontorson à une batterie antichar qui lui fait subir des pertes sérieuses, puis déboulant dans la Grande Rue de Pontorson en tirant en éventail, rapidement ils prennent le pont sur le Couesnon et arrivent ainsi en Bretagne, à Ville-Chérel, le 1er août. Les Allemands surpris n’ayant pas eu le temps de faire sauter le pont sur le Couesnon, seul passage pour l’entrée nord de la Bretagne.

C’est de ce village que l’armée de Patton se sépare alors en trois parties pour libérer toute la Bretagne. Le gros des troupes prenant la direction de Pleine Fougères pendant q’une partie de cette armée organise un dépôt de munitions en prévision de la prise de la ville de Dol.

A 9 heures solaires les premiers libérateurs arrivaient en tirailleurs à l’entrée de ce village.

Les habitants guidés par des anciens combattants de 14-18 avaient creusé des tranchées assez loin du village et s’y étaient mis à l’abri lorsqu’ils virent des flammes jaillir de leurs demeures. De très loin l’on voyait l’incendie se propager.

Des témoins virent les Allemands qui avant de quitter les lieux mirent le feu, maison par maison, à la moitié du village. Plusieurs fermes brûlaient, Le bétail fut brûlé vif dans les étables. les habitants qui s’étaient terrés dans des abris virent plusieurs allemands se rendre aux américains

Une batterie allemande placée à Villartay fit beaucoup de dégâts, une deuxième batterie abat un avion de reconnaissance qui tombe dans les prairies. Un avion allemand touché par la DCA tombe du côté de l’Angevinière. Plusieurs gros engins américains sont détruits dans le haut du village, les renforts arrivant, de nombreux prisonniers sont faits, incroyable, aucun américain n’est blessé.

Le calme revenu, les villageois sortent de leurs abris et trouvent sous les pommiers sept allemands, gisant à terre vers la cote du caillou, tués lors des combats par le premier char américain. Plusieurs prisonniers étaient déjà parqués, un matériel énorme était à pied d’œuvre. Les champs étaient remplis d’engins de toute sorte.

Beaucoup de canadiens se trouvaient parmi les premiers arrivants

Les libérateurs.

Se trouvant chez son oncle à Sains le 1er août, ils attendaient avec impatience l’arrivée des libérateurs quand tout à coup apparaît une jeep qui s’arrête juste devant la maison. De derrière les carreaux on observe, pas d’erreur d’après les uniformes ce sont des américains. Tout le monde sort saluer. Dans cette jeep, un chauffeur et un soldat ayant la cinquantaine, sans galons. Le tonton qui avait fait la guerre de 14 va lui chercher la meilleure bouteille de sa cave. Cet homme pose des questions, s’il y a des allemands, et demande des renseignements sur la région.

C’est la joie, on se sent libérés.

Francis reprend le chemin de Saint Georges, quand arrivé au bas de Saint Georges il voit un attroupement, un cercle de jeunes soldats américains assis par terre, et au milieu de ce cercle, une jeune fille qui venait de se faire tondre par une équipe de jeunes. Une distraction pour ces soldats, mais combien d’exactions aussi ont put être commises sous le prétexte de l’épuration.

Cependant plus sérieuse était la situation au carrefour, là, deux individus venus des fermes des polders, s’étant emparés d’une mitrailleuse allemande, et semblant bien éméchés, disent « Nous allons lui faire son affaire ».

Comprenant que ces deux résistants de dernière heure avaient l’intention de faire de grosses bêtises, il prévient un sous officier américain qui envoie immédiatement une jeep pour désarmer ces deux lascars.

Pensant que l’armée avait pris la direction de Dol, il prend donc la route de Saint-Broladre et avance jusqu’à Saint-Marcan et s’aperçoit alors qu’il a devancé les libérateurs. Il rencontre Cordon, l’entrepreneur de carrières de Saint-Broladre, qui armé d’un gros revolver venait de faire quelques prisonniers allemands.

Apercevant alors un soldat allemand il décide de le désarmer, se cache au bord de la route revolver au poing. Une jeune fille l’apercevant lui crie attention, un allemand. Ce dernier l’apercevant alors se sauve à toute vitesse à travers champs.

Quelques allemands se trouvant encore à Saint-Broladre, il décide alors de passer par les Tertres de La Claie et là il rencontre les libérateurs qui se préparent à avancer vers Dol.

Face au café Bienvenu, à la Guingette, au bas des tertres, sur une grosse pierre, un officier et son ordonnance faisaient le point sur une carte. Il leur explique alors qu’autour de Dol se trouvent des tranchées’ qu’il trace sur la carte’ et que les marais sont inondés. Il fut surpris par cet officier qui parlait très bien le français, mais plus encore par son ordonnance qui parlait notre patois. Il lui demande s’il n’était pas de Baguer, l’autre lui répond alors qu’il est canadien et « qu’il fait des patates coum par sée nous ».

Dol.

Depuis que les alliés ont débarqué en Normandie, Dol nœud ferroviaire important est devenu un point stratégique qui voit transiter par sa gare, matériel et renforts vers le front.

Les raids de l’aviation alliée se multiplient, deviennent même incessants. Rares sont les jours où les bombes ne viennent détruire voies ferrées, locomotives du dépôt, trains de munitions ou de soldats. Dol sous les bombes est en alerte permanente, les sirènes hurlent sans fin. Les raids sur la gare n’épargnent pas le bourg de Carfantin où plusieurs maisons sont détruites.

La ville de Dol se vide petit à petit. Les autorités ont fait évacuer le quartier de la gare puis c’est la rue de Paris et la place Chateaubriand. L’eau devient rare, les coupures d’électricité sont fréquentes.

Des renforts allemands montent vers le front de Normandie, manquants de moyens, ils réquisitionnent chevaux et charrettes. Souvent le fermier ou aussi le charretier sont réquisitionnés pour le transport de munitions vers le front. Ce fut le cas du charretier de la grand-mère de Saint-Georges qui ramena son cheval mais dut abandonner sa charrette prise sous le feu de la bataille. Beaucoup revinrent seuls laissant sur place chevaux et charrettes.

A Dol, le mardi 1er août, l’ordre est donné aux habitants de quitter la ville avant 2 heures du matin en laissant portes et fenêtres ouvertes. Ceux qui resteront seront considérés comme francs tireurs et abattus sans sommation. La plupart des habitants fuient la ville.

Certains se cachent comme ils le peuvent, un voisin cheminot se cache dans une armoire, un autre se cache dans l’épais laurier qui se trouve au fond du jardin.

A Saint-Georges, le beau-père de Francis a creusé un abri antiaérien dans son jardin où l’on se met à l’abri à la moindre alerte.

Libération de Dol.

Le premier août, un groupe de chars américains sort de Pontorson, passe le Couesnon sur un pont de fortune, surgit à Ville-Cherel et apparaît sur les hauteurs de Pleine Fougères.

Au clocher de Baguer-Pican, des guetteurs surveillent l’horizon.

Ordre est donné à tous les civils d’évacuer la ville avant deux heures du matin, le tocsin sonne et c’est une émigration lamentable de gens chargés de bagages par les seules routes qui restent libres : celle de Dinan et celle du Mont-Dol. Un très grand nombre de dolois avec parmi eux leur curé cherchent asile au Mont-Dol. Plusieurs veulent quand même rester, mais, au matin du 2 août, l’exode est imposé sous la menace du revolver. Quelques-uns uns arrivent à se cacher, tandis que les boches fouillent les maisons, fermées ou ouvertes, et s’emparent de tout ce qui leur plaît, surtout les bicyclettes.

Le 2 août on voit quelques éléments avancés à Baguer-Pican, jeep de reconnaissance, camions et auto mitrailleuses, un sérieux accrochage a lieu avec les Allemands qui fait des victimes des deux bords.

Venant de la Touche en Epiniac, une jeep prend la direction de Dol avec quelques hommes. Elle essuie des coups de feu venant d’un détachement allemand se trouvant dans les carrières de Pont Limier. Une heure plus tard elle est de retour au cantonnement, un homme est blessé à la tête. On le dépose au P.C. de la ferme Pichon en Epiniac. Le blessé placé sur un brancard en travers de la jeep portait une étiquette au poignet, serais-ce ce militaire qui fut soigné à l’hôpital de Pontorson.

Ce jour là, Cohuet était tué à coups de baïonnette à Ringlins.

Le 3 août, une petite formation américaines s’arrête au bourg, des accrochages ont lieu, une jeep et un char sont touchés et prennent feu. Les occupants sont tués.

Vers 20 heures, de grosses unités américaines prennent position, à 22 heures tout le dispositif est en place pour l’attaque de Dol qui se déclenchera le lendemain à l’aube.

Des avions américains survolent Dol continuellement.

Dans la nuit du 3 au 4 août, tous les Allemands quittent Dol à la faveur de la nuit.

Pour la libération de Dol, Francis Pelé se trouve sur les hauteurs de Baguer-Pican pour accueillir les Américains. Avec d’autres résistants du pays de Dol il leur fournira de précieux renseignement. Francis Pelé qui se trouve alors tout près de sa terre natale du Petit-Mesnil observe ces soldats qui, après avoir monté très lentement la côte des tertres de la Claie, s’arrêtent au Loup Pendu et creusent des trous individuels pour y passer la nuit.

Francis pelé de rend chez une cousine qui habite à proximité, au Petit Mesnil, et passe la nuit dans une meule de paille, le temps était très beau.

Au milieu de la nuit de violentes détonations se firent sentir, tellement fortes que chaque coup vous soulevait de terre.

Cette nuit là, des fermes de la Lande de Sains et de l’Angevinière et plusieurs de mont Rouault brûlaient ; les allemands envoyaient des engins incendiaires pour essayer d’arrêter l’avance des alliés. Déjà dans la nuit du 1er août, à sains, le château de l’Angevinière avait été incendié par les S.S., là étaient entreposés tous les postes de radio qui avaient été requis et des munitions en grandes quantités.

Par quels engins destructeurs les Allemands avaient-ils fait tant de dégâts, ils pensaient que l’ennemi avait détourné se rampes de lancement en vue d’arrêter la percée d’Avranches. Un seul avion allemand en flamme fut aperçu qui alla s’écraser vers la Normandie.

Le vendredi 4 août 1944, vers 4 heures du matin, les soldats sortent de leurs trous individuels et chacun s’affaire fait sa toilette, change de linge, précaution utile en cas de blessure.

Francis Pelé sort de sa meule de foin.

A Baguer-Pican, Progression des fantassins, les hommes ont quitté les camions. Photographie Tony Vaccaro.

Tout autour d’eux un matériel considérable était rassemblé, dans chaque champ des batteries de tous calibres, mais surtout dans les champs du Motais, là où se trouve actuellement le camping, un nombre important de canons de gros calibres, tout était en place, braqué sur Dol, les hommes à pied d’œuvre et approvisionnant les obus. Il ne suffisait que donner l’ordre et Dol devenait Saint-Lô.

Du Loup Pendu deux jeeps vont en reconnaissance vers Dol, peu de temps se passe lorsque se fait entendre une mitraillade et des coups de canon de petit calibre puis le silence. Un char part en reconnaissance jusqu’à la cote des Bégauds en avant de Dol. Ce char tire alors un obus de 75 sur une batterie allemande qui répond par un tir et ils voient revenir à son point de départ ce char qui vient s’arrêter dans un champ voisin. De ce char éventré, on sortit un américain ayant la cuisse arrachée au niveau du tronc, il était encore vivant. Ses compagnons quittent le char et y mettent alors le feu pour le détruire, une chenille étant rompue, afin qu’il ne puisse tomber aux mains des allemands en cas de repli.

La libération de Dol s’annonçait mal, l’armée Patton avait bien progressé dans le pays de Dol puisque de Pontorson une partie de cette armée avait pris la route de Pleine Fougères, La Boussac, Lanhélin et la foret du Mesnil ; D’autres éléments se rabattent vers Baguer Morvan, Dol était encerclé.

L’artillerie américaine est en position à la hauteur de Baguer-Pican prête à entrer en action. L’infanterie et les blindés sont prêts à foncer sur Dol et le Mont-Dol. Vers 8 heures, tous les hommes sont dans les jeeps, les canons « débraqués » pris en remorque, un ordre discret est communiqué, l’équipe de combat du 330ème commandé par le colonel Forster reçoit l’ordre de pousser immédiatement sur les côtes, de foncer vers Dol et d’en déloger l’ennemi. L’attaque doit être lancée pour 10 heures. Une première colonne d’infanterie précédée de quelques chars s’ébranle. Le 323ème bataillon de campagne doit se tenir prêt aux priorités de tir d’artillerie du QG à 10h00, en support général du régiment ainsi que la Cie C du 86ème. La Cie C du 802ème blindé en support rapproché doit rester disponible pour des missions de tir direct sur le clocher de l’église de Dol et sur les barrages routiers.

A 9 heures 10, le Général Macon Commandant de la 83ème division d’infanterie recevra le message suivant du Brigadier Général Ferenbaugh : «Vous pouvez considérer la ville de Dol comme à vous et vous pouvez planifier depuis ce point».

Une Jeep arrive à la Croix de la Feuillade, sur les hauteurs les fantassins sont déployés. Confirmés du départ des Allemands, ils s’engagent sur deux rangs, à la file indienne, les véhicules au milieu, dans la rue de Paris.

A 11 heures 50, le 2ème bataillon du 330ème traverse Dol, à 12 heures 45, le 330ème annonce que son objectif est atteint, l’opération de nettoyage est encours, à 16 heures 10, Dol est nettoyé.

Francis pelé et quelques autres civils se trouvant là qui avaient hâte de rentrer dans leurs murs suivent cette troupe aussitôt le terrain libre. Pas de fumée sur Dol, pas de canonnade. Arrivés à la côte des Bégauds, sur le bas côté de la route, une grande quantité de bouteilles et de boites de conserves vides les impressionne.

Les soldats américains avancent avec prudence mais sans s’arrêter. Encore quelques centaines de mètres et ils découvrent deux jeeps encore fumantes entièrement calcinées qui sont dans l’entrée d’un champ. A peu de distance, à la croix de la Feuillade, un avion de reconnaissance américain encore fumant gisait disloqué.

S’avançant vers l’une des jeeps il découvre les deux servants restés calcinés comme des momies, le chauffeur avait son casque percé par un obus en plein front, son compagnon tenait encore son fusil entre ses mains.

Un américain passant sur la route descend de sa jeep, et regarde les noms figurant sur les plaques que chacun de ces militaires possédait, attachée par une chaîne, autour du cou.

En rentrant dans la rue de Paris et passant devant le mur antichar , il regarde les bâtiments que les Allemands avaient incendiés, puis il arrive au pont de chemin de fer que les Allemands ont fait sauter. Déjà les hommes de la Cie B du 308ème bataillon du génie étaient sur place avec un important matériel et commençaient à jeter de grosses poutres de fer et de bois au-dessus de la voie pour rétablir le passage. Ils vont rétablir les deux ponts, faire sauter deux barrages routiers et commencer un enclos pour les prisonniers de guerre.

Deux colonnes de G.I. progressent dans la ville et passent devant le magasin Electric-Radio au 50 Grande rue.

Les derniers allemands venaient de quitter Dol et Francis Pelé réussit à leur récupérer un vélo.

L’ordre n’a pas été donné à l’artillerie d’entrer en action car il semble que l’état major U.S. ait été informé que la nuit même les Allemands avaient quitté Dol.

Dol est libéré, et dans l’après-midi, les habitants regagnent leurs logis, heureux d’en être quittes à si bon compte, alors que le pire était à craindre.

Dol pouvait, en effet, être un gros obstacle à l’avance de l’armée américaine en direction de Saint-Malo. En cas de résistance, étant donné les cinq cents canons braqués sur la ville sur les hauteurs de Baguer-Pican et les trois cents avions prêts à intervenir, cet obstacle aurait certainement été anéanti.

Plusieurs personnes pensent avoir été par leurs démarches à l’origine de cette décision. Il est probable que les Américains furent prévenus en même temps par plusieurs personnes en des endroits différents. Ce qui est certain c’est que les archives américaines font état de nombreuses informations données par des civils au Q.G. du 330ème le 4 août à Baguer-Pican ainsi que d’un rapport de la police française de Cancale, policiers guidés vers le P.C. américain par mon beau-père monsieur Constant Nicolle.

La libération, c’est le départ des allemands mais aussi la fin de l’oppression, la fin des contraintes et des privations, de la peur et des angoisses quotidiennes. C’est aussi le sentiment d’être, d’exister et l’espoir d’une vie nouvelle.

C’était la liesse sauf pour quelques collaborateurs se faisant huer ou quelques filles se faisant tondre les cheveux.

Quelques jeunes gens dont Francis Robillard hissent le drapeau tricolore au sommet de la cathédrale et sonnent les cloches à toute volée. On fête les libérateurs.

Francis pelé retrouve sa maison dans un désordre épouvantable, en effet, la veille jeudi 3 août, des troupes venant du front de Normandie et arrivées les jours précédents à Dol se sont livrées au pillage, mais c’était la fête. Il s’empresse d’aller chercher sa femme et ses enfants et sort les drapeaux aux fenêtres pendant que l’armée américaine défilait sans arrêt prenant la direction de la Bretagne.

Les bonnes bouteilles cachées que les occupants n’avaient pu découvrir sont débouchées, tout le monde est ivre de joie et l’on fête les libérateurs.

Sur la porte de la mairie les Américains affichent que toute personne détentrice d’un poste émetteur de radio doit le remettre immédiatement aux autorités.

S’exécutant immédiatement il prend sous son bras l’émetteur en sa possession et montant vers la mairie, passant devant le petit café près du porche, il se fait héler par un grand gaillard blond qui l’accompagne jusqu’à la mairie où il dépose son émetteur.

Cet homme qui se faisant appeler Léo ne lui inspirait pas confiance et il le remmena dans son café.

L’après midi, il se rend place Toullier au P.C. de la Military Police installé hôtel des Trois marchands où le Dr Stairmann avait installé son P.C. de F.F.I. lorsqu’il voit passer cet homme qui l’avait tant intrigué.

Il fait alors signe au P.M. de faction qui le comprend et va interpeller l’homme qui était en possession d’un gros revolver.

Son intuition ne l’avait pas trompé, l’homme en question n’était pas un aviateur américain comme il le laissait entendre et comme le lui avait assuré la personne qui l’avait recueilli.

En effet, vers le mois de juin, la patronne du café est venue lui demander de réparer un poste de radio et lui confie « j’ai recueilli un aviateur américain ». Chez cette dame dans la cuisine il voit en effet un grand gaillard blond avec des vêtements d’aviateur se tenant près de l’appareil à dépanner ; C’était un magnifique meuble radio phono qui le choqua par sa présence insolite dans une si modeste maison. Il fait son diagnostic et dit en allemand « Schouen Spal Kaput » guettant une réaction de ce soi disant aviateur. Il prévint la dame de sa méfiance et elle le rassura, l’homme lui montra des photos qui étaient vraiment américaines.

Le samedi 5 août, c’est la fête qui continue, il y a des passages intenses de matériel roulant vers Saint Malo. A la mairie on reçoit les vainqueurs, des fleurs sont déposées au monument aux morts.

Quelques jours après la libération de Saint Malo, se rendant au P.C. des F.F.I. avenue du 47ème, il entend sous les fenêtres un questionnaire assez brutal, regardant, il aperçoit son soi-disant aviateur attaché sur une chaise et subissant la question. Il devait avouer avoir tué à coup de sabre le grand-père Pansart des autocars de Saint Malo et avoir cambriolé sa villa.

La guerre n’est cependant pas terminée, l’Allemagne ne capitulera que le 5 mai 1945.La date officielle de la cessation des hostilités fut le 1er juin 1945.

La résistance aida au nettoyage des forêts en capturant les groupes d’allemands isolés puis continua quelques temps, non plus la lutte contre les Allemands, mais contre les collaborateurs et contre les ennemis du peuple.

Des cérémonies patriotiques exaltèrent la mémoire des disparus, des fêtes religieuses nombreuses furent suivies par les foules, de nombreuses statues de la vierge furent érigées en reconnaissance de sa protection.

Les anniversaires de la libération de la ville furent bien entendu fêtés tous les 4 août, messe, défilé, cérémonie patriotique avec hommage aux morts, défilé de chars fleuris pendant les premières années.

Francis Pelé recevra la croix du combattant le 10 mai 1970 à l’occasion du 25ème anniversaire de la libération

Certificats :

Pour la remise d’un poste émetteur, la Mairie de Dol de Bretagne délivrera un reçu ainsi libellé :

Le 4 août 1944, reçu de M. Pelé, un poste émetteur.

Signé :   F. Roptin   Maire de Dol.

A l’occasion d’une exposition sur la résistance, ce poste émetteur sera emprunté à la sûreté nationale :

République Française, Ministère de L’intérieur,
Direction Générale de la Sûreté Nationale ;
SN/STR/6 N° D. 2.334/6.143.

 

            RENNES, le 23 août 1946.

Note pour  M. Pellé :

            Le poste émetteur appartenant à M. Pellé Francis, demeurant à Dol de Bretagne, 50 Grande Rue, est confié à l’intéressé pendant une période de dix jours, pour lui permettre de le présenter dans une exposition d’objets ayant servis au maquis.

Ce poste est actuellement placé sous scellé, sera retourné au C.E.R. par les soins de M. Pellé.

Rennes, le 23 août 1944

Henri Gremet
Commissaire de Police, chef du G.E.R.

Destinataire :  M. Pellé. ( Dossier 6143).

Depuis personne n’a pu revoir ce poste émetteur et malgré plusieurs demandes de recherches, il fut impossible de savoir ce qu’il est devenu.
 

Sources : Archives familiales, notes manuscrites Francis Pelé.

En savoir plus : Francis Pelé, Un Dolois raconte la libération, Le Rouget de Dol, n° 46, 2 eme semestre 1984.

 
communication Michel Pelé

mise à jour : 21/05/2011