Mémoire des pertes que la Ville et Commune de Dol a essuyées
depuis la révolution française, sans en avoir été dédommagée par aucun
bienfait ou établissement quelconque si ce n'est une administration et un
tribunal de District qu'on s'est bientôt empressé de lui enlever et un
tribunal de police correctionnelle qu'on lui a
ôté pour le transférer à Montfort.
Article premier.
On se ressouvient qu'il était dû par l'ex trésor royal à la ville de Dol une
très ancienne rente de 70 à 80 francs par an qu'on prétend même avoir été
originairement de 100 francs à 120 francs, mais réduite en différents temps
par des retenues et suppressions à 70 ou 80 francs.
L'armée vendéenne qui séjourna onze jours à Dol au mois de brumaire an deux
détruisit presque tous les titres de la ville,soit pour en faire des
cartouches et des gargousses,soit en les brûlant et les foulant aux pieds
par les appartements et les escaliers de 1'ex évêché. Après le départ de
cette armée le général Tribout donna ordre de faire balayer nettoyer et
fumer la maison et de jeter tout ce qui provenait de ce balayage par les
fenêtres sans qu'on fut à lieu d'en faire aucun triage, les administrateurs
n'étant pas sur les lieux. On ne peut donner aucune preuve de l'existence
réelle de cette rente, par la raison qu'on n'en a plus de titres; mais elle
était réellement due à la ville et c'est une perte d'un capital de ...................................
1.600 francs
Article 2.
La ville de Dol a la possession immémoriale des promenade publiques sur ses
boulevards vulgairement nommés douves, et conséquemment des fossés,
bas-fonds et talus qui les soutiennent. L'administration du domaine s'en est
emparée et les a affermé à son profit sous prétexte que l'évêque de Dol
était seigneur de ce lieu Cependant la ville fait encore à ses frais
actuellement les réparations de ces promenades, et en loué temps les a
entretenues, tant de barrières, tourniquets que de gros pieux pour en fermer
le passage aux chevaux, ce qui est à la connaissance de tous les habitants
de la ville. Le domaine afferme ces fossés ou douves environ cinquante franc
par an, soit de capital ................................................................
1.000 francs
Notes historiques. - Les boulevards, les éperons à l'extérieur des
fortifications de la ville, ne sont pas très anciens, ils ne datent tout au
plus que de trois cents et quelques années. Le genre de ces fortifications
n'existait pas avant ce temps; elles auraient été inutiles, la poudre et le
canon n'étaient pas inventés. Il y a trente ans on savait encore le nom
d'une maison ou métairie qui existait en la place de l'éperon dit des carmes
; dernièrement on en a encore trouvé les fondations et le puits.
Article 3.
La même ville entretenait une fontaine publique à ses frais et par les
libéralités des ex-Etats de Bretagne qui venaient quelquefois à son secours,
surtout lorsqu'il se trouvait de grosses réparations à faire aux conduits,
aqueducs, portes sur la rivière, regards, etc. Sur la colonne qui existe
encore au milieu du bassin de cette fontaine était une statue de bronze de
la hauteur de 17 décimètres, représentant Saint - Samson, patron de l'ex
diocèse de Dol; cette statue avec une inscription au pied aussi de bronze
fut abattue au commencement de la révolution par le premier bataillon de la
Manche en garnison à Dol, troupe indisciplinée, sous prétexte
d'aristocratie. Recueillie par les habitants, le prix en fut employé avec le
prix des grandes et petites boites de la ville, aussi en bronze, et servant
aux réjouissances, pour parvenir à l'acquisition de doux pièces de canon de
quatre, leurs caissons, etc. Ces canons dont le gouvernement s'est emparé
peuvent valoir environ neuf mille francs dont la commune a fait toutes les
avances, tant par ces dons volontaires que var le bronze qu'elle a
fourni libéralement ci...........................................9.000
francs
Notes historiques. - On ne connaît pas l'époque de la première
érection de la fontaine publique. On sait seulement qu'elle fut rétablie
vers 1660, que l'archidiacre Thoreau gouverneur de Dol frère de l'évêque du
même nom y fit joindre la fontaine de Vaudoré.
Avant ce temps il n'y avait que celle de Cleret qui venait à Dol par
les bas de la Rousse.
Article 4.
La destruction de cette fontaine publique à Dol où il n y avait point d'eau
de source vive, si ce n'est à Carfantain Plus a'un kilomètre loin de la
ville, cause une perte incalculable tant sous le rapport incalculable
qu'entraîne l'apport d'eau d'aussi loin que sous le rapport de la santé
lorsque cette fontaine fut détruite et que ces tuyaux furent brisés
par la soldatesque, elle fluait très bien était en bon état et ne coûtait
d'entretien que deux a trois mille francs par an. Aujourd'hui pour la
remettre en état reconstruire beaucoup de regards relever généralement tous
les tuyaux fourniture de ceux manquants, achat de voix résine à cimenter de
chaux vive,pierres de moelon pour
reconstruction,réparation de conduits dans les
prairies,excavations dans les terres élevées,retrouver la chaîne des tuyaux
et la rétablir dans la longueur d'environ cinq kilomètres de Dol à
Vaudoré,on ne peut estimer cette dépense a moins de
................................... 33.600 francs
Notes historique.- La raison pour laquelle il ne se trouve plus d'eaux vives
à Dol et la nécessité d'avoir établi une fontaine résulte de l'exhaussement
du sol de la ville en différents temps pour se garantir des invasions de la
mer. On prétend que beaucoup de puits qui existent dans la partie basse de
la ville et sur le bord du marais étaient originairement des fontaines avant
que la vaste et profonde vallée d'entre Dol et le Mont-Dol fut comblée par
la mer. Le puits de l'évêché était de ce nombre : c'était une fontaine
existant dans les caves de l'ancien château que des personnes vivantes ont
encore vue et où l'on abreuvait jadis les chevaux en temps de siège lorsque
Dol était place de guerre. Ces caves ont été comblées et l'on a fait un
puits de cette fontaine, lors de la butine de l'ex - évêché il y a 48 à 50
ans.
Article 5.
La ville percevait des octrois sur les vins, cidres et poires des débitants
de quinze à seize communes environnantes, elle les affermait au moins trois
mille francs par an soit en principal
........:..... 60.000 francs
Article 6.
Les pauvres de la commune de Dol outre la maison destinée a l'usage de la
marmite où l'on distribuait le bouillon tous les Jours, jouissaient d'une
rente de six cents francs par an (un pieux évêque de Dol avait fait cette
fondation): il existait à Dol la fondation des soeurs grises dites de la
Sagesse qui instruisaient les enfants de leur sexe et portaient les remèdes
et les secours à domicile. Elles recevaient quatre cents francs par la
caisse du clergé, fondation faite en partie par un digne ecclésiastique
recteur de Carfantin, l'un des faubourgs de Dol. Les deux maisons ont été
réunies à l'hospice; mais les revenus sont anéantis. La ville de Dol a perdu
privativement pour ce seul objet destiné au soulagement de ses pauvres mille
francs de rente sans y comprendra les deux maisons soit en capital
.......................................... 20.000 francs
Notes historiques.- L'auteur
ecclésiastique de Bretagne donne
Carfantin pour faubourg de Dol. Il y a apparence que la ville s'étendait
autrefois jusqu'à la Rousse que d'anciens titres nomment d'ailleurs Ville
Viel, ce qui veut dire vieille ville.- Dans le temps de la féodalité il
existait un baillage de Ville Viel dont les droits se percevaient sur les
terres de la Rousse; ce baillage dépendait de 1'ex - seigneurie de château
d'Assy.
Article 7.
Le collège de Dol ayant été incendié en partie par une réquisition de
troupes de l'ex Basse Bretagne qui y logea en l'an deux, cet événement
détermina l'administration départementale d'Ille et Vilaine à mettre les
restes de cette maison en vente avec les jardins. Cet établissement
magnifique digne, du pieux évêque qui 1'érigea, le dota et qui en fit
présent à la ville appartenait à Dol. Cinq mille francs de rente en
dépendait le tout a été vendu au profit de l'état. Cette perte présente pour
la ville de Dol,sans y comprendre la privation de l'éducation publique que
des parents sont obligés de procurer à leurs enfants à trente,quarante et
cinquante kilomètres loin de chez eux,monte à six mille francs de rente,en
capital .. ........... 120.000 francs
Notes historiques .- A la place de ce collège était autrefois une chapelle
au milieu d'un champ ou cimetière qu'on nommait St James et qui avait servi
au temps de Mr James évoque de Dol,vivant en quatorze cent quelques,pour
l'inhumation des pestiférés.
Article 8.
Il existait à Dol une halle sur toute l'étendue de laquelle était un assez
vaste appartement qui servait de salle de délibérations à la maison de ville
et d'auditoire. A cette salle était jointe une chambre du conseil. Par un
arrêté que prit un représentant du peuple en l'an deux sur le voeu prononcé
par quelques habitants, il ordonna que ce bâtiment serait détruit sous le
spécieux prétexte qu'il obstruait la grande rue et donna en échange à la
ville l'ex église notre - Dame qui était regardée comme désormais ne
pouvoir, ni ne devoir plus servir au culte De tous temps la ville de Dol
s'était servi de cet édifice pour ses assemblées politiques et en avait la
possession immémoriale. L'évêque entretenait seulement la couverture en tant
que hall» a blé,aussi percevait - il le jour da marché le droit de
coutume,tant pour indemnité de cette charge que pour celle de l'entretien
des pavés publics où se tenaient les marchés;mais le corps de ville qui y
tenait ses séances en avait les clefs et la possession de droit et de fait
on peut estimer le loyer de cette grande salle de la maison de ville avec la
chambre du conseil y attenant,cent cinquante francs au minimum,soit en
capital............ 3.000 francs
Article 9.
Le loyer de la boucherie est également une perte pour la ville; sa
destruction avec les halles lui cause un grand préjudice. Elle affermait
seulement la boucherie au commencement de la révolution huit cents francs,
soit en capital ..................................................................................
16.000 francs
Article 10.
Dans le corps de ville de Dol, étaient deux charges de maire, l'une
d'élection et l'autre en titre. Le possesseur de cette dernière gérait deux
années et celui d'élection qu'on nommait triennal ou électif n'en gérait
qu'une. Des habitants zélés pour le bien public achetèrent cette charge au
nom de la ville en 1778 ère ancienne; par ce moyen la ville se trouvait aux
droits de ce maire qui recevait tous les ans du gouvernement l'intérêt du
montant de la finance, et acquittait certains droits qu'on nommait Poulet.
L'intérêt devait être de deux cents francs par an, La ville, aux droits du
maire en titre a donc essuyé par la révolution cette perte qui présente un
capital de ..............................................................................
4.000 francs
Article 11.
Autrefois existaient deux paroisses en la ville de Dol, Notre-Dame et le
Crucifix. Toutes les deux avaient leur maison presbytérale et leur jardin;
ces propriétés ont été vendues au profit du gouvernement. L'évêché de Dol
ayant été supprimé, la maison de l'évêque devait remplacer naturellement le
presbytère de la ville, et quoique décorée du nom de Palais épiscopal elle
n'était au fond que le premier des presbytères du diocèse. Sous ce point de
vue, qui est le seul vrai, cette maison doit rentrer dans la classe de tous
les autres presbytères, et, conformément au concordat être remise à. la
commune pour servir de logement- aux curé^et vicaires, avec toutes ses
dépendances. Il est étonnant, d'après cette loi formelle que le domaine s'en
soit emparé. En attendant la décision du gouvernement sur cette affaire, la
commune est forcée de payer provisoirement le loyer d'une maison au curé de
Dol, ce à quoi elle ne serait pas tenue si on lui avait remis dans le temps
cette maison de 1'évêché, comme on le devait sur le champ, lors de la
promulgation de la loi du concordat; ou qu'on n'eut pas vendu précédemment
les deux presbytères. On peut au reste mettre en ligne de compte comme perte
évidente ces deux maisons qui peuvent valoir année commune quatre cents
francs, ci en capital ................................................................................
8.000 francs
Si l'on joint à toutes ces pertes réelles dont l'état est ci-devant qui se
montent au capital de 262.000 francs, xcelles
essuyées par les habitants de Dol par l'armée vendéenne qui les pilla
pendant onze jours, celle au moins de cinq cent
mille francs de rentes qui se consommaient dans le pays,
provenant des revenus de 1'évêché,
des chapitres, collège,
abbayes, couvents,
prieurés, fabriques,
séminaires, chapelles, prestimonies,
des biens des émigrés et maisons opulentes des alentours
qui ont passé dans les mains d'acquéreurs étrangers et se consomment
ailleurs, on considérera que la ville de Dol est
l'une des plus perdantes a la révolution, proportion gardée
qu'elle a mis ce pays dans un état presque
d'anéantissement dont il ne pourra se relever à moins que le gouvernement ne
vienne à son secours, ne lui fasse restituer quelques uns de ses anciens
établissements qu'on lui a enlevés injustement au détriment même de l'état
ou ne lui procure dans un autre genre par un dessèchement des marais qui
composent une partie de son territoire et un canal navigable à la mer dont
il est si près, en quelque sorte une nouvelle
existence, de manière que cette ville et ce pays puissent se flatter que le
gouvernement impérial par sa bienfaisance,1'a régénéré,
le gouvernement qui est le seul conservateur, l'opposé et
le contraste de presque tous les autres régimes.
Fait à Dol, le 25 floréal an XIII (25 mai 1805)
Extrait des registres de correspondance de la Municipalité de Dol.
P.C.C.
Michel Pelé 23 janvier 1979
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